Patrick Bonnewitz est agriculteur. Mais aussi à la tête d’une entreprise agricole et d’une société de transport. Il déneige aussi les routes en hiver. À 32 ans, il ne compte pas ses heures pour mener toutes ses activités de front.
Pour Patrick Bonnewitz (à gauche), accompagné par son bras droit Alexis Weber, pour réussir, il faut être bien entouré. Photo DNA /Léa SCHNEIDER
Rapidement, lorsqu’on discute avec Patrick Bonnewitz, la question qui surgit est : à quoi carbure-t-il ? Au café, à l’angoisse du vide ? Rien de tout ça. Comme le jeune agriculteur de 32 ans le dit lui-même : son moteur, c’est l’envie. « Si quelque chose ne me plaisait pas, j’arrêterais ! » Il faut croire qu’entre son exploitation de vaches laitières à Salmbach, son entreprise de prestations agricoles avec semoir à maïs, sa société de transport et son activité de déneigeur à ses heures, tout lui plaît encore.
« J’ai été élevé comme ça »
« J’ai été élevé comme ça, se souvient-il. Sans le travail, on n’est rien. » Les circonstances aussi l’ont poussé à se diversifier. Il a repris la ferme familiale de vaches laitières à la mort de son père au début des années 2000, aidé par son grand-père et sa mère. Parallèlement, il a lancé son entreprise agricole, où il embauche un premier employé, puis un autre, pour rentrer de l’herbe en silo, presser des bottes carrées, faire de l’ensilage de maïs… « L’hiver, les tracteurs étaient disponibles : j’en ai profité pour faire un peu de transport. » En 2017, il fait de cette activité annexe une société à part entière, et reprend une entreprise seltzoise, ses quelques camions et une partie de ses contrats. « Il y avait toujours de la demande : on a acheté un autre camion, puis encore un autre… », se souvient Patrick Bonnewitz, qui emploie en tout 25 salariés aujourd’hui. Il reprend aussi le contrat de déneigement qu’avait cette entreprise seltzoise pour le Département et pour une grande entreprise du secteur.
À l’écouter, ce parcours paraît aller de soi : chaque nouvelle activité était liée aux précédentes, d’une façon ou d’une autre. Et Patrick Bonnewitz est manifestement un touche-à-tout qui apprend sur le tas : l’agriculture, la mécanique, il maîtrise. « Et maintenant, j’apprends la maçonnerie pour rénover une maison que j’ai achetée parce que j’avais le temps long », ironise-t-il.
Être bien entouré pour tenir la cadence
Mais pour tenir une telle cadence, il faut être bien entouré : c’est la première chose que souligne l’entrepreneur. « Pour en arriver là, il faut une bonne équipe. Et une sacrée femme à la maison - on dit bien que derrière chaque grand homme, il y a une grande femme, non ? » Il peut compter sur le soutien de son épouse, de sa mère, et d’Alexis Weber, son bras droit depuis deux ans, qui passe quelques coups de fils dehors, bonnet sur la tête, en ce froid après-midi de janvier. « Il faut savoir estimer tout le monde pour ses qualités, et travailler avec des ouvriers motivés, qui bossent pour satisfaire le client », ajoute-t-il.
« Il est toujours à l’écoute de tout le monde, et dès qu’un client appelle, il trouve toujours une solution, précise Alexis Weber. Je crois que la clé est là. » Lui qui vient de ranger ses post-it s’étonne encore : « Je crois que je ne l’ai jamais rien vu noter, il a tout en tête, c’est impressionnant. » « Je ne sais pas pourquoi, mais ça se fait tout seul, continue Patrick Bonnewitz. Quand je me couche le soir, j’ai les plannings qui tournent en boucle dans ma tête. » Même s’il faut parfois « savoir couper pour sa vie de famille, si on m’apporte une machine en panne à 16 heures, je n’arrête de bosser qu’au moment où elle redémarre. Parfois, c’est le lendemain à 7 h.» Il enchaîne les activités : « S’il y a un problème à l’étable ou avec une machine, on m’appelle et je viens. »
Une tête pleine de projets
« On est là pour le client, pour les employés, sans oublier la famille bien sûr, continue Patrick Bonnewitz. Mes grands-parents qui n’habitent pas loin et gardent toujours un œil sur ce qui se passe me demandent parfois si je suis fou. Quand mon grand-père a commencé l’agriculture, on labourait encore avec les chevaux, aujourd’hui, quand on lui parle de labourer plusieurs dizaines d’hectares en une journée, il n’en revient pas. »
En saison agricole, ses nuits y passent parfois aussi : Patrick Bonnewitz estime travailler – lui, pas ses employés – 60 heures par semaine, et passer « au moins deux mois » par an au téléphone. « Je dors les fins de semaine », rit-il, quand il ne profite pas de ces moments de calme relatif pour faire le tour de toutes ses installations. « Partir en vacances ? On essaie parfois, sur les plages sans activité. Mais parfois, au final, ma femme doit partir seule… » Il ne prévoit pas de s’arrêter pour autant, au contraire : « Dans cinq ans, l’entreprise aura encore changé. Je vois toujours plus loin : est-ce que c’est peut-être une maladie ? On est tous malades de quelque chose, moi c’est peut-être du travail », sourit-il.
Et ce ne sont pas les projets qui manquent pour continuer sur cette lancée : Patrick Bonnewitz a déjà prévu « le prochain épisode » pour son entreprise, « un gros truc » qui serait en train d’aboutir, même s’il n’en dira pas plus. La recette est vite résumée : pour lui, il faut « estimer chacun pour ses qualités, garder les pieds sur terre et travailler. Alors, on arrivera peut-être à quelque chose. Moi, j’ai fait de ma vie ce que je voulais. »
Publié le 12 janvier 2021 par